AQUI-FR
plateforme de modélisation hydrogéologique nationale (France)
AQUI-FR
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Personne en charge de la pratique innovante :
Jean-Pierre VERGNES – jp.vergnes@brgm.fr
AQUI-FR est une plate-forme de modélisation hydrogéologique nationale conçue comme un outil de valorisation des travaux de modélisation hydrogéologiques réalisés en France. Démarré en 2014, AQUI-FR vise à regrouper au sein d’une même plate-forme numérique des modèles hydrogéologiques développés par différents instituts de recherche. AQUI-FR réunit ainsi 8 partenaires (ENS, CERFACS, BRGM, Ecole des Mines PARIS, Météo France, Géosciences Rennes, LHyges, UMR METIS) dans le but de développer une meilleure connaissance de la ressource en eau souterraine passée, présente, et future. AQUI-FR vise à mettre en place des prévisions de l’évolution des eaux souterraines en France à des échelles de temps allant de la dizaine de jours à l’échelle saisonnière (+6 mois) à partir de prévisions atmosphériques via des indicateurs piézométriques standardisés. La plate-forme permet aussi de réaliser des modélisations prospectives (jusqu’à 2100), en se basant sur les modélisations hydrogéologiques développées et utilisées par les gestionnaires de l’eau, lorsqu’elles existent, et à favoriser le développement de ces modélisations là où elles n’existent pas. Une structure informatique permet l’association de 3 modèles hydrogéologiques (EROS, MARTHE, EauDyssée), un modèle de flux d’eau et d’énergie (SURFEX), et un système d’analyse atmosphérique (SAFRAN). Le couplage dynamique des modèles est quant à lui assuré par le coupleur OpenPALM. La plate-forme AQUI-FR est déployée sur les machines opérationnelles de Météo-France et bénéfice de son appui pour le suivi quotidien. La plate-forme a été utilisée sur un total de 14 applications distribuées d’aquifères et de 23 applications sur des systèmes karstiques. Dans le futur d’autres modèles régionaux seront intégrés afin d’étendre la couverture spatiale.
Entité responsable
Plusieurs entités sont responsables de la plate-forme AQUI-FR. Le département de Géoscience de l’ENS est le coordinateur de la plate-forme.
Cadre institutionnel
Le modèle national étant construit sur des applications hydrogéologiques existantes, chacun des partenaires reste propriétaire de son modèle hydrogéologique et les résultats sont accessibles au grand public.
Cadre géographique
Les simulations issues de la plate-forme couvrent la France métropolitaine à hauteur de 35%. Le modèle EauDyssée couvre la Basse-Normandie, la Somme, la Seine, la Loire et quatre sous-systèmes : Marne-Loing, Marne-Oise, Seine-Eure, Seine-Oise. Le modèle MARTHE couvre l’Alsace, la Basse-Normandie, le Nord Pas-de-Calais, le Poitou-Charentes, et la Somme. Enfin, le modèle EROS couvre 23 systèmes karstiques (taille médiane de 99 km²).
Explication détaillée
La plateforme de modélisation représente les principaux processus hydrologiques se produisant dans les bassins versants, depuis les précipitations jusqu’aux écoulements souterrains. Dans sa forme actuelle, le système AQUI-FR comprend trois logiciels de modélisation hydrogéologique couvrant 11 aquifères sédimentaires et 23 systèmes karstiques : la plateforme numérique hydro-géologique EauDyssée, le logiciel MARTHE et le logiciel EROS utilisé pour les systèmes karstiques. Ces logiciels sont embarqués dans une application développée avec le système de couplage OpenPALM
Tous ces modèles couvrent une superficie d’environ 149 000 km2 et contiennent jusqu’à 10 couches aquifères superposées. AQUI-FR tient compte de l’hétérogénéité spatiale en utilisant différentes échelles spatiales. L’analyse météorologique SAFRAN disponible sur l’aire métropolitaine française à une résolution de 8 km fournit les variables météorologiques au modèle de surface terrestre SURFEX qui évalue le bilan hydrique sur l’aire métropolitaine française. SAFRAN fournit les précipitations horaires (pluie et neige), la température, l’humidité relative de l’air, la vitesse du vent et le rayonnement descendant. SURFEX utilise ces variables atmosphériques pour résoudre le bilan d’énergie et d’eau de surface à l’interface terre-atmosphère à une échelle de 1 à 2 ans et à un pas de temps de 5 minutes. SURFEX estime la répartition spatiale du flux entre le ruissellement de surface et la recharge des eaux souterraines sur la grille de résolution de 8 km de SAFRAN. Il tient compte des différents types de sol et de végétation et utilise un schéma de diffusion pour représenter le transfert de chaleur et d’eau à travers le sol. Le sol dans SURFEX est représenté par une approche multicouche. Sa profondeur varie en fonction de la végétation (en France de 0,2 à 3 m) et est partiellement accessible aux racines des plantes. L’infiltration du sol en profondeur constitue le flux de recharge des nappes phréatiques. Le ruissellement de surface peut se produire en fonction d’un excès de saturation ou d’un excès d’infiltration. La simulation du bassin versant dépend de ses caractéristiques hydrogéologiques. Pour les bassins sédimentaires, ces deux flux sont transférés aux modèles d’eau souterraine MARTHE ou EauDyssée. Ces modèles simulent le transfert vers la zone non saturée, les flux d’eau souterraine dans et entre les couches aquifères, l’acheminement des eaux de ruissellement vers et dans les rivières, et les échanges rivière-aquifère. Ils tiennent également compte des nombreux prélèvements d’eau souterraine dans les bassins fluviaux. La résolution temporelle est journalière, et la résolution spatiale varie de 100 m à un maximum de 8000 m. La profondeur de la couche aquifère la plus profonde peut localement atteindre environ 1000 m. Il faut souligner que les modèles hydrogéologiques auraient pu être classiquement alimentés par les données de précipitation, d’évapotranspiration potentielle et de température de l’analyse SAFRAN en utilisant leur propre calcul de bilan hydrique. Cependant, l’utilisation combinée de SURFEX et SAFRAN fournit un ensemble cohérent de données hydrométéorologiques sur une grille de résolution de 8 km sur la France, incluant la recharge des nappes et le ruissellement de surface de SURFEX, ainsi que l’évapotranspiration potentielle, les précipitations et la température de SAFRAN. L’utilisation de ces flux de résolution 8 km de SURFEX a rendu nécessaire la recalibration des modèles hydrogéologiques inclus dans la plateforme. Les systèmes aquifères karstiques sont simulés par une approche de modélisation conceptuelle de réservoir à l’aide du logiciel EROS. Chaque système karstique est représenté par un modèle de réservoir à une échelle de temps journalière. Les approches conceptuelles sont privilégiées pour la simulation des systèmes karstiques. En effet, leurs hétérogénéités rendent difficile l’utilisation d’une approche basée sur la physique. EROS utilise les précipitations journalières, la neige, la température et l’évapotranspiration potentielle fournies par SAFRAN pour calculer les débits des sources karstiques. Techniquement, la plateforme de modélisation hydrogéologique AQUI-FR a été développée en utilisant le système de couplage OpenPALM qui permet d’intégrer facilement des applications de calcul haute performance de manière flexible et évolutive. Dans le cadre d’OpenPALM, les applications sont divisées en composants élémentaires qui peuvent échanger des données. La plateforme AQUI-FR est une application OpenPALM qui regroupe actuellement cinq composants.
Une étape préliminaire est réalisée afin d’estimer la recharge des nappes phréatiques et l’écoulement de surface avec SURFEX en tenant compte du forçage atmosphérique de SAFRAN avant de lancer OpenPALM. Cette étape préliminaire donne accès à 60 années de recharge journalière des eaux souterraines et de ruissellement à une résolution régulière de 8 km sur l’ensemble de l’aire métropolitaine française. Ces flux d’eau sont ensuite accessibles par l’application OpenPALM. Ensuite, les logiciels de modélisation EauDyssée, MARTHE et EROS calculent l’évolution des variables hydrogéologiques simulées pour le pas de temps courant pour chaque modèle d’eau souterraine indépendamment. Un dernier composant de post-traitement synchronise la simulation (il attend que tous les modèles aient terminé leurs calculs pour le pas de temps courant) et rassemble les sorties individuelles de chaque modèle pour les écrire en sorties globales pour l’ensemble du domaine. Enfin, un signal est envoyé par le composant de post-traitement afin de permettre à la plate-forme de calculer le pas de temps suivant. L’utilisation d’OpenPALM permet d’exécuter pour chaque instance des modèles en parallèle sur plusieurs processeurs. La simulation sur 60 ans nécessite environ 1,5 jour de temps de calcul sur un ordinateur haute performance.
Historique
La première phase du projet dès 2014 a eu pour objectifs de montrer la faisabilité d’un tel outil via la construction de la structure informatique AQUI-FR et les premières évaluations, ainsi que de s’assurer des possibilités légales d’exploitations des applications hydrogéologiques en opérationnel, et enfin, d’identifier les éléments d’intérêts pour les gestionnaires de l’eau. La construction de la structure AQUI-FR a nécessité plusieurs étapes : (i) rassembler les modèles hydrogéologiques sur une même structure informatique mobilisable en opérationnel, (ii) intégrer les différentes applications hydrogéologiques disponibles, (iii) converger vers un traitement homogène à l’échelle nationale, via a minima l’utilisation d’un forçage atmosphérique commun, (iv) recaler les applications pour les rendre plus compatibles avec ce nouveau forçage.
Ce travail s’est accompagné d’un effort de traitement des données d’entrée et de sorties. En entrée, un aspect important est l’intégration des prélèvements en nappe sur les périodes simulées, données difficiles à acquérir sur de longues périodes et pour les périodes récentes (délais de 2 ans). La gestion des variables en sortie nécessite un travail spécifique, en tenant compte d’une part des variables d’intérêts pour les gestionnaires (variable, profondeur ou couche géologique, période d’estimation, domaine d’estimation) et des contraintes numériques (volumes disques, temps de calcul). En parallèle, deux efforts de développement ont été menés, afin (i) d’inclure une représentation des aquifères de socle, avec des expérimentations numériques réalisées sur les aquifères bretons et (ii) de permettre une correction des états initiaux des nappes en intégrant les données piézométriques disponibles.
Preuve des avantages
Les résultats du projet AQUI-FR confirment la faisabilité de rassembler des modèles hydrogéologiques indépendants développés dans différents instituts de recherche dans une même plateforme de couplage. Tous ces modèles ont été initialement développés et calibrés sur des périodes plus courtes avec des bases de données géologiques et météorologiques hétérogènes, mais l’évaluation des simulations à long terme qui a été réalisée montre une bonne comparaison avec les observations disponibles pour la même période. Elle confirme la pertinence de l’utilisation de l’AQUI-FR comme outil pour les études d’impact à long terme.
Figure 3 : Indice de niveau piézométrique standardisé entre les piézomètres observés (a) et simulés (b).
L’autre avantage de cette plateforme réside dans sa modularité. La plateforme AQUI-FR encourage le développement de la modélisation des eaux souterraines là où elle fait défaut et, plus généralement, elle a le potentiel d’être un outil précieux pour de nombreuses applications dans la gestion des ressources en eau et dans les études de recherche, par exemple dans les études sur le changement climatique et les prévisions saisonnières.
Potentiel de reproduction dans la région SUDOE
Le facteur déclenchant pour la mise en œuvre de la pratique a été la publication des résultats du projet Explore 2070 qui a montré une analyse disparate et donc l’idée a émergé d’harmoniser les résultats de modélisation pour faire des prévisions. D’un point de vue technique, peu d’obstacles ont été rencontrés. Les obstacles rencontrés ont été par rapport à la propriété intellectuelle. En effet, il a fallu un accord autour du partage du code source du modèle Marthe pour l’implémenter sur la plateforme Météo France. Du côté conceptuel, les modèles n’étaient pas parfaitement calibrés : certaines sorties de modélisations se recouvrent. Du point de vue administratif, il a fallu convaincre les régions, car les modèles hydrogéologiques étaient développés au sein d’entités régionales du BRGM. Enfin, d’un point de vue fonctionnel, la maintenance de la plate-forme nécessite un chercheur permanent par partenaire. Le projet a pu également bénéficier de subventions (environ 100 k€ / an).
Perspectives d’évolution
En termes d’évolution, le projet offre plusieurs perspectives en termes (i) d’amélioration des processus physiques : meilleure intégration des aquifères de socle et karstiques, et (ii) de développement : évolution des codes numériques et des techniques.
Ce projet offre en outre des perspectives de développement hors métropole, dans les DOM, mais aussi des perspectives dans le cadre des PEPR (programme One Water).
Dans le futur, d’autres modèles régionaux seront inclus afin d’étendre la couverture d’AQUI-FR (aquifères de roche-mère situés en Bretagne). Une nouvelle méthode de modélisation basée sur un modèle pluie-ruissellement sera utilisée pour fournir les débits des rivières en amont comme conditions limites pour les modèles MARTHE qui le nécessitent. Enfin, puisque les erreurs dans les conditions initiales peuvent altérer de manière significative la compétence de la prévision, des études dédiées à l’assimilation de données pour améliorer les conditions d’état initial sont également réalisées en parallèle.
Points-clés de la méthode innovante
- Plate-forme numérique multi-modèles
- Prévisions journalières à saisonnières
- Modélisation prospectives (jusqu’à 2100)
Remerciements
La pratique innovante a été suggérée par Jean-Pierre VERGNES (BRGM) qui a également participé à l’entretien.
References
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Description et objectifs du projet
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Informations sur le projet
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